Il y avait un temps où personne n’entrait dans un bureau syndical en portant son gilet en coton biologique avec un logo « Sauvons les baleines » et probablement personne ne prenait part à la parade local du Jour de la terre avec un casque et des bottes de travail. Mais la mode change et les perceptions aussi. Les membres des syndicats et les environnementalistes ont découvert qu’ils avaient beaucoup plus de choses en commun que ce que les gens pouvaient croire.
Comme dans toute relation, le chemin partant d’une méfiance mutuelle, en passant par une reconnaissance réticente, pour finalement se solder par une accolade chaleureuse a été pavé d’obstacle tout au long du parcours. Ce que nous en sommes arrivés à comprendre, c’est que notre planète a besoin de nous, et non de nous qui se positionnent les uns contre les autres.
Ce que nous avons réalisé est pourtant très simple : personne ne profite d’une course vers le bas; pas les travailleurs, pas les espèces sauvages et certainement pas nos collectivités. Ainsi, couper le dernier arbre, expédier les derniers barils de bitume et attraper tous les poissons dans l’océan vont peut être garnir des comptes « offshores » à quelque part, mais cela ne nous donnera pas de bons emplois pour nos enfants, des collectivités saines ou un environnement productif.
En regardant dans notre passé, un moment qui a probablement commencé quelque part dans les arbres, avec quelques regards furtifs et une rencontre fortuite ou deux, les syndicalistes et les environnementalistes en sont venus mutuellement à la conclusion que l’environnement inclut également les gens. Ainsi, nous nous sommes assis et avons partager un repas ensemble et avons trouver un chemin commun dans des endroits comme la Forêt du grand ours, le Nord-Est de la Colombie-Britannique et l’ensemble de la vaste forêt boréale qui s’étend à travers le Canada. Malgré nos différences, nous savions qu’en arriver à équilibrer la protection de l’environnement et le développement économique serait beaucoup satisfaisant mutuellement qu’une autre opération de relations publiques.
Par la suite, une autre lumière s’est allumée. Nous avons regardé l’ensemble des immenses défis collectifs auxquels notre monde était confronté, comme les changements climatiques, et nous avons vu qu’après ce grand nuage noir, qu’après cette pluie, si nous étions intelligent, il pourrait y avoir du beau temps : de bons emplois pourraient être créés par l’entremise de nouvelles sources d’énergie, de nouvelles façons de l’emmagasiner, de nouvelles façons pour déplacer les gens et de nouvelles façons de combler leurs besoins d’air pur et d’eau potable (ce que les autres espèces ont également besoin). Les études et l’expérience sur le terrain nous démontrent que cette approche a un potentiel d’emplois beaucoup plus élevé que si nous mettons tous nos œufs dans le même panier avec l’exploitation de nos ressources naturelles brutes. En fait, près de sept fois plus d’emplois sont générés pour chaque dollar investi dans des solutions comme le développement d’énergies renouvelables ou l’augmentation de l’efficacité énergétique au lieu de pelleter plus de sables bitumineux en Alberta.
Ensemble, nous avons établi des stratégies pour faire du Canada un chef de file en développement et déploiement de solutions vertes et propres. Certains syndicats investissent directement dans des solutions vertes, par l’entremise de véhicules comme Cycle Capital Management, une firme de capital de risque appuyée en partie par de l’argent des syndicats, qui investissent dans des produits et des services à la fine pointe de la technologie qui aide notre environnement. Plus largement, nous mettons de l’avant un plan « les emplois de l’avenir sont verts » par l’entremise de l’alliance Bleu Vert, qui est devenu une voix forte faisant la promotion du lien entre agir pour un environnement sain et agir pour l’emploi.
Pour certaines personnes à Ottawa, cette alliance pourrait paraitre comme un mariage de tous les diables. Ces personnes n’ont pas encore compris le message à savoir vers où notre monde se dirige et qu’il est temps de prendre le développement durable au sérieux. Ils font beaucoup plus partie de l’école du pillage et voient tout ce qui pourrait venir entraver l’exploitation totale des ressources brutes, et des travailleurs, comme étant lâche. « Vous devez être endurant » nous disent-ils à travers la fenêtre de leur limousine. « Qu’est-ce que quelques caribous lorsque des emplois sont en jeu? » Mais ils ne parlent pas des bons emplois qui permettent aux gens d’acheter une maison dans leur collectivité; ils parlent des emplois dans les raffineries en Chine et dans les bureaux des grandes banques à Toronto.
Mais nous les avons à l’œil. Nous avons constaté comment les salaires et les conditions de travail diminuent là où le nombre de membres des syndicats diminue. Et nous avons constaté comment les lois protégeant notre l’environnement, l’une après l’autre, sont retirées lorsqu’un gouvernement décide qu’uniquement la main invisible du marché devrait tirer les ficelles, laissant plusieurs collectivités humaines et naturelle au bout du fil.
Un rapport récent de l’Institut Broadbent documente le lien entre un mouvement syndical fort et des niveaux plus élevé d’égalité sociale. Inclut au sein de cette idée d’égalité sociale est le besoin de faire attention à la génération actuelle et aux générations futures à l’aide d’actions prévoyantes, comme une saine gestion de notre environnement. Aujourd’hui, le rempart que les syndicats fournissent contre les impulsions économiques à court-terme qui réduisent notre équité sociale et notre cohésion sociale a besoin d’être renforcé, et non affaibli.
Heureusement, nous avons parcouru un long chemin depuis les jours où les syndicats et les environnementalistes se défiaient du regard sur les lignes de piquetage. En se tenant debout ensemble sur la pelouse de l’Assemblée législative de la Colombie-Britannique l’automne dernier pour la manifestation « Sauvons notre côte », nous avons été en mesure de constater à quel point cette alliance avait un potentiel énorme. Maintenant plus que jamais, nous avons besoin de faire grandir ce lien, pour que nos collectivités soient fortes, pour que nous ayons de bons emplois et pour que nous ayons un environnement sain.
Tzeporah Berman et Steven Guilbeault sont des auteurs ainsi qu'environnementalistes de renom. Tzeporah vit en Colombie-Britannique et Steven habite au Québec.
Cet article est une réponse au rapport de l'Institut Broadbent sur le mouvement syndical et la prospérité sociale, « Des communautés syndiquées, des communautés en santé ».
Photo: Kris Krug. Utilisée sous une licence Creative Commons BY-SA 2.0.