Génération charnière

Ariane Krol
14 mars 2014
Cette article fût publiée par La Presse.
 

Les jeunes travailleurs ont-ils la vie plus dure que les baby-boomers? Le magazine L'actualité et l'Institut Broadbent tentent ces jours-ci de répondre, chacun à leur manière, à cette question plus complexe qu'elle n'en a l'air.

Le marché de l'emploi n'est pas tendre envers les jeunes. À 13,9%, le taux de chômage des Québécois de 15 à 24 ans est presque deux fois plus élevé que celui de l'ensemble de la population active (7,8%). Même des diplômés universitaires ont du mal à se placer.

La situation des jeunes travailleurs n'est pas de tout repos non plus. Souvent plus endettés que leurs parents ne l'étaient à leur âge, ils regardent les prix de l'immobilier en se demandant s'ils auront un jour les moyens d'acheter.

Et pourtant... Le niveau de vie des Québécois de 25-34 ans est meilleur que celui dont jouissaient les baby-boomers à la même période de leur vie, conclut L'actualité après avoir compilé 27 indicateurs de l'équité intergénérationnelle. Oui, la dette publique nette par habitant s'est alourdie dans la province. Et le ratio entre le prix moyen des maisons et le revenu médian après impôt se dégrade. Mais les jeunes parents ont accès à des services de garde beaucoup moins chers que ce qu'ont payé les baby-boomers. Et ce, alors que leur revenu médian après impôt s'est amélioré, tout comme l'équité salariale... entre autres. 

On n'est donc pas si étonné de voir que les jeunes sondés pour l'Institut Broadbent dans l'ensemble du Canada se montrent plus optimistes que leurs parents. Près de la moitié (49%) des baby-boomers pensent que les débouchés économiques seront moins intéressants pour la génération Y qu'ils ne l'ont été pour eux, alors que seulement le tiers (34%) des participants de 20 à 33 ans partagent ce point de vue. Et même si ces derniers s'attendent à avoir moins d'emplois permanents et plus de contrats que leurs parents au cours de leur carrière, leur capacité à payer assez d'impôts pour soutenir les programmes sociaux les inquiète beaucoup moins.

Insouciance de la jeunesse? Permettez-nous d'en douter. Seulement 16% des jeunes Canadiens croient qu'ils verront l'écart entre les riches et les pauvres diminuer de leur vivant, alors que 60% pensent qu'il s'élargira. La mode n'est pas aux lunettes roses au Québec non plus. Le taux de dépression majeure a augmenté chez les 20-33 ans, et la satisfaction générale à l'égard de la vie a reculé, montrent les indices de L'actualité.

Le portrait, évidemment, est partiel. On parle ici de questions pour lesquelles on dispose de données mesurables, ou d'opinions mesurées récemment. Il y en a bien d'autres. Du financement des retraites à la répartition des fonds publics en passant par le remboursement de la dette, les intérêts des boomers et des générations qui les suivent risquent de s'opposer sur bien des sujets au cours des prochaines années.